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De sa voix mémorable à ses rôles marquants, en passant par son engagement, Alan Rickman a tout d'un homme inspirant !

Le décès d’Alan Rickman, on s’en souvient comme si c’était hier. Les mains pianotant sur son clavier, Raine effectuait ses recherches pour un mémoire autour de l’esthétique du film A Little Chaos (Les Jardins du Roi). Chaos, c’est la sensation que nous avons eu à l’annonce de la nouvelle. En son honneur, retour sur cet homme dont la voix profonde et les rôles nous ont marqué.

Une voix mémorable

Rien qu’à l’entente du nom Alan Rickman, on est persuadées que la première chose qui vous vient à l’esprit est sa voix. Mais saviez-vous que ce timbre profond, lent et calme, c’est à un handicap de l’enfance qu’il le doit ? En effet, en raison de sa mâchoire inférieure très serrée, il lui était impossible d’articuler. Résultat, ses paroles sortent de manière étouffées. Avouons-le, cela n’a aucun inconvénient tant il est capable de nous faire frémir au moindre mot.

Et en parlant de frémir, son interprétation du Vicomte de Valmont dans l’adaptation théâtrale de Christopher Hampton des Liaisons Dangereuses en 1985 doit son succès à cette voix inoubliable. The Guardian assurait même qu’avec « cette voix traînante empreinte de largeur, et ce visage impassible, il se glisse sournoisement et imperceptiblement dans l’action comme un chat qui connaît le chemin vers la crème« . À noter que suite à ce succès, l’acteur britannique désirait reprendre ce rôle dans Les Liaisons Dangereuses de Stephen Frears. Malheureusement, la production lui a préféré John Malkovich dont la carrière était plus florissante. Imaginez la dimension qu’aurait pu prendre le film si Alan Rickman en avait fait parti.

Lindsay Duncan (Marquise de Merteuil) et Alan Rickman (Valmont) - Les Liaisons Dangereuses
Lindsay Duncan (Marquise de Merteuil) et Alan Rickman (Valmont) - Les Liaisons Dangereuses

Courant 2008, une étude de l’Université de Sheffield conduite par le Professeur Andrew Linn a même affirmé que Alan Rickman avait une voix parfaite. En effet, après la notation de 50 voix basée sur une combinaison impliquant tonalité, fréquence, intonation, vitesse et mots à la minute, Rickman est arrivé en première position. On y retrouve également Jeremy Irons et Dame Judy Dench.

Alan Rickman et le théâtre

S’il est reconnu pour sa carrière cinématographique, il ne faut pas oublier qu’Alan Rickman vient avant tout du théâtre. Théâtre qu’il n’a jamais oublié, y revenant fréquemment au court de sa carrière. Parmi son nombre de crédits impressionnant, on compte pas moins de 13 pièces de Shakespeare. Enfin, 10 puisqu’il a endossé à deux reprises le rôle de Jacques dans Comme il vous plaira, joué Angelo, puis Friar Peter dans Mesure pour Mesure et Laertes, puis, Hamlet dans la pièce éponyme.

Alan Rickman dans le rôle d'Hamlet | Mise en scène : Robert Sturua | Londres | 1992

N’ayant jamais eu l’opportunité de le voir sur scène, on aurait tout donné pour être assez âgé à l’époque pour le découvrir face à Helen Mirren dans Antoine et Cléopâtre ou dans une pièce d’Anton Tchekhov. En effet, il a joué dans Oncle Vania et La Mouette.

Plus étonnant encore, si l’on connait les différents interprètes au cinéma de Sherlock Holmes, saviez-vous qu’Alan Rickman avait endossé les traits du célèbre détective dans une pièce en 1976 ? Nous non, mais on aurait adoré voir ça. D’autant plus que c’est David Suchet – alias Hercule Poirot – qui y incarnait le Professeur Moriarty.

Alan Rickman (Sherlock Holmes) et Michael Hugues (Dr. Watson) lors d'une représentation de Sherlock Holmes au Birmingham Rep (1976)

Des antagonistes iconiques

On ne va pas se le cacher, les incarnations les plus marquantes d’Alan Rickman restent des « méchants ». À commencer par le charismatique, élégant et rusé Hans Gruber (Die Hard : Piège de Cristal). Premier rôle, premier succès. D’ailleurs, si Gruber reste aujourd’hui l’un des meilleurs vilains de tout les temps, c’est entièrement grâce à son interprète. En effet, en se détachant du cliché du terroriste, il a permis à son personnage de prendre une nouvelle dimension.

Évidemment, nous ne pouvions aborder ses rôles d’antagonistes sans mentionner le Shérif de Nottingham (Robin des Bois : prince des voleurs). Rôle accepté uniquement après avoir eu carte blanche concernant la création du personnage. Personnellement, rien que la vue de sa coupe de cheveux suffit à nous effrayer.

Mais celui qui vous a certainement le plus marqué reste certainement Severus Snape. Ayant campé le rôle pendant 10 ans, Alan Rickman a offert au personnage tout ce dont nous pouvions rêver – jeunesse en moins -. Car bien que Snape haïsse Potter, le jeu de l’acteur transpire l’histoire en résultant. Un background dont lui seul avait le secret depuis le premier film.

Un acteur capable de tout jouer

Bien que la carrière d’Alan Rickman ait tardivement décollé, sa filmographie n’en reste pas moins conséquente. De la romance à la comédie en passant par le drame, la palette de l’acteur est impressionnante.

De part son aisance à jouer des antagonistes, le drame lui colle à la peau. On le retrouve notamment dans le téléfilm Raspoutine (1996) ainsi que dans Dark Harbor (1998), drame lent et complexe ou il se retrouve face à Norman Reedus. Il apparaît également dans Une promesse (2013) de Patrice Leconte. Mais Alan Rickman a un véritable sens de l’humour et l’a prouvé à plusieurs reprises. Notamment en jouant dans Galaxy QuestGambit : Arnaque à l’anglaise ou Blow Dry. Dans ce dernier, il nous a d’ailleurs étonné en coiffeur habitué des concours et délaissé par sa femme.

Côté romances, impossible de ne pas citer Raison et Sentiments et son interprétation du Colonel Brandon. Sans compter sur Love Actually qu’on ne peut s’empêcher de regarder chaque année à l’approche de noël ! Qui n’a pas adorer y détester Harry, cet homme attiré par sa secrétaire alors que sa femme – incarnée par Emma Thompson – y est si charmante ?

Plus surprenant encore, l’homme est capable de chanter. Vous aurez donc l’occasion d’entendre sa voix grave dans le film Sweeney Todd (2007) de Tim Burton mais aussi dans Gloups ! je suis un poisson et CBGB (2013). On affectionne tout particulièrement ce dernier car il revient sur ce grand club new-yorkais où sont passés de nombreuses pointures musicales (The Ramones, Patti Smith, Sex Pistols, AC/DC…). En parlant musique, Alan Rickman a également posé sa voix sur le titre Start a family de Texas. Il a également chanté en français au cours de l’enregistrement de l’audiobook The Return of the Native de Thomas Hardy.

Nos rôles favoris

Impossible d’aborder nos rôles favoris sans le thriller psychologique Closet Land (1991). Rien que le fait qu’il s’agisse d’une sorte de huis clos permet de nous concentrer pleinement sur les deux personnages : l’interrogateur et sa victime. Alan Rickman y interprète le premier avec brio. Un homme à la dualité sans pareil. Nous vous parlions de sa palette d’acting, ici, elle est au grand complet. Tantôt conciliant, tantôt tyrannique et angoissant, il déclenche une gamme d’émotions renversantes. Cependant, le film dénonçant des techniques d’interrogatoires particulièrement violentes – même si suggestives à l’écran -, on ne recommande pas ce film à tout public.

Dans un registre totalement différent, nous l’avons adoré en Metatron dans le Dogma (1999) de Kevin Smith. Sous ses airs d’ange sarcastique dépourvu de sexe, il fait preuve d’un humour décapant à mourir de rire. Tout à fait le genre de personnage dont nous n’avions pas conscience d’avoir besoin avant de le découvrir ! Autant dire qu’ici, Dogma est devenu l’un de nos films de chevets en cas de coup de mou.

On se souvient aussi de son rôle d’oenologue dans Bottle Shock. Un film inspiré d’une histoire vraie et mettant en scène Steven Spurrier dans sa conquête des vins californien. Conquête qui lui permettra de sélectionner des vins afin de représenter les USA lors de la célèbre dégustation de 1976 alias le « Jugement de Paris ». On avoue, les paysages y sont pour beaucoup !

Alan Rickman : Réalisateur et metteur en scène

Outre ses nombreux rôles, Alan Rickman est passé derrière la caméra afin de se prêter au jeu de la direction, scénarisation et mise en scène. Pour son premier essai, il s’attaque à l’adaptation de L’invité de l’hiver (1997). Pièce qu’il avait eu l’occasion de tester sur scène deux ans auparavant. Inspiré par la mère de l’actrice britannique Lindsay Duncan – avec qui il a partagé l’affiche à plusieurs reprises – le film met en scène Emma Thompson face à sa propre mère – à la vie comme à la scène -, Phyllida Law. Essai concluant puisqu’il a obtenu trois prix dont le prix du meilleur film au Festival international du film de Chicago.

Il faudra cependant attendre 2014 avant qu’il ne repasse derrière la caméra pour Les Jardins du Roi. Compréhensible après avoir passé 10 ans sur les tournages d’Harry Potter nous direz-vous ! Dans cette nouvelle réalisation, Rickman explore les jardins de Versailles à l’époque de leur création. En effet, on y retrouve André Le Nôtre (Matthias Schoenaerts) supervisant la paysagiste Sabine de Barra (Kate Winslet) dans la conception du bosquet de Rocailles. Ce qu’on y a le plus aimé ? L’esthétique signée Ellen Kuras. Prenez cependant bien cette oeuvre en tant que fiction car les éléments présents sont largement inspirés par la période historique en question.

Sharman Macdonald et Alan Rickman sur le tournage de L'invité de l'hiver

Par ailleurs, Alan Rickman n’a cessé de montrer son amour pour le théâtre en mettant en scène pas moins de sept pièces entre 1980 et 2010. Trois d’entre elles sont notamment affiliées à Ruby Wax : Desperately YoursLive Wax et Wax Acts.

Un homme engagé

Loin des personnages qu’il incarne à l’écran, Alan Rickman se révèle bienveillant et généreux. En atteste son testament prévoyant des chèques de 100 000£ à quatre associations britanniques dont la RADA (Royal Academy of Dramatic Art). Véritable incubateur de talents britanniques dont il était vice-président de 2003 à 2016. À noter que l’acteur britannique a toujours été présent pour la jeunesse, leur prodiguant des conseils et assistants à de nombreuses pièces (notamment celles de la RADA).

Même en étant l’un des acteurs les plus prisés de sa générations, Alan Rickman n’a jamais hésité à donner de son temps. En effet, entre 2000 et 2012, il apparaît dans trois courts-métrage. Le premier n’est autre qu’une adaptation de la pièce Play de Samuel Beckett par Anthony Minghella. Second court de Ben OckrentDust met en scène un homme suivant une mère et sa fille. Pourquoi ? On vous laisse le découvrir par vous-même. Avec The Boy in the Bubble, l’acteur ne prête que sa voix, se faisant narrateur pour le septième court-métrage de Kealan O’Rourke.

Fin 2015, c’est également sa voix qui se retrouve au centre du spot publicitaire de l’association One Click Giving. Et encore une fois la cause est charitable puisqu’il s’agit d’une récolte de fonds pour aider les enfants et réfugiés. Une partie des revenus générés par la vidéo a en effet été reversée aux fondations Save The Children et Refugee Concil. Toujours côté associatif, il était président d’honneur de IPAT – association de lutte contre la pauvreté dans le monde – et responsable de l’association Saving Faces.

Évidemment, on ne pouvait parler de son engagement sans évoquer son soutien à la cause féministe. Un fait qui s’explique aisément par le nombre de femmes fortes dans son entourage. Car si vous ne le saviez pas, c’est à la mère du jeune Alan qu’a incombé la tâche de l’élever seule suite au décès de son père alors qu’il n’avait que huit ans. Maître de conférence en économie, sa femme, Rima Horton est également influente.

Citation Alan Rickman - Visuel par Les Insouciantes

Mémoires en préparation

Fin novembre 2020, The Guardian a annoncé que Canongate allait publier les 27 journaux intimes d’Alan Rickman en un livre. Journaux qu’il a débuté au début des années 1990 et a poursuivit 25 ans durant avec l’intention qu’ils soient un jour publié.

Nous ne pouvions demander plus beau cadeau de sa part. D’autant plus qu’à travers ses mémoires, Alan Rickman partage ses réflexions sur le métier d’acteur. Que cela soit à propos de son propre acting ou de celui des autres dont il analyse le comportement sur les plateaux de tournage ou sur scène. En effet, en grand amateur de théâtre, Alan Rickman pouvait assister à plusieurs représentations par semaine. Ces journaux intimes seront donc l’occasion de découvrir des critiques de pièces auxquelles il a pu assister.

Alan Rickman dans une loge

Évidemment, comme vous, nous avons hâte d’en savoir plus sur ses grands rôles. Des Liaisons Dangereuses à Piège de Cristal en passant par Robin des Bois où la saga Harry Potter, nous risquons d’être surpris par les anecdotes de celui qui restera dans nos coeurs comme l’un des acteurs les plus remarquables. Ajoutez à cela le fait que sa femme, Rima Horton, ait appuyé sur le fait que ces carnets révèlent « l’acteur mais aussi le vrai Alan » pour nous conquérir. Surtout lorsqu’il est décrit comme un homme pourvu d’un sens de l’humour, d’un savoir-faire, capable d’observations pointues et dévoué aux arts.

The Diaries of Alan Rickman devrait sortir à l’automne 2022. Du moins, dans sa version originale puisque le projet n’a visiblement pas encore trouvé sa maison d’édition française. On doute cependant qu’avec une telle carrière, ce livre ne trouve LA maison d’édition qui lui permettra de rejoindre vos étagères tôt ou tard.

Vue sur le Albert Memorial depuis le banc dédié à Alan Rickman | ©Raine | 2017
Vue sur le Albert Memorial depuis le banc dédié à Alan Rickman | ©Raine | 2017

Rendre hommage à Alan Rickman

Ses cendres ayant été rendues à la famille, il n’existe aujourd’hui aucune tombe à son nom. Outre la voie 9¾ à King Cross où bon nombre de fans lui ont rendu hommage, un lieu de recueillement a été mis en place au sein de la capitale britannique.

Envie de lui rendre hommage à votre tour ? Rien de plus simple. Lors d’une visite à Londres, il vous suffira d’arpenter Kensington Gardens. Non loin de l’Albert Mémorial, se trouve un petit square. Là, entouré par le calme environnant, a été installé un banc incrusté de la citation suivante : « It would be wonderfull to think that the future is unknown and sort of surprising » (Ce serait merveilleux de penser que l’avenir est inconnu et en quelque sorte surprenant).

Pour la petite histoire, ce banc a pu être conçu grâce à une cagnotte organisée courant 2016 par Joanna Parker, une fan désireuse d’avoir un endroit où « s’assoir et penser à tous ses grands films et tout ce qu’il a fait pour aider d’autres jeunes acteurs en devenir,…«  Ce projet a d’ailleurs reçu le soutient de la famille d’Alan Rickman qui a eu le choix finale de la citation gravée.

ATTENTION

Il  est interdit de laisser photos, fleurs,… sur ou à côté du banc. Dans pareil cas, les services de nettoyage du parc les enlèverons.

Si vous tenez à apporter quelque chose, il est donc conseillé de les poser sur le banc le temps d’une photo, puis, de l’enlever.

 

*  L’appareil photo violet désigne le banc

Et vous, que retenez-vous d'Alan Rickman ?

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