« Le Consentement » ou l’emprise d’un pédophile acclamé par la critique littéraire

Image montrant Gabriel Matzneff (Jean-Paul Rouve) et Vanessa Springora(Kim Higelin) dans le film "Le Consentement"

Dans Le Consentement, Vanessa Filho met en images la relation de Vanessa Springora avec l’écrivain Gabriel Matzneff. Un film avec pour thématique l’emprise d’un véritable prédateur. Sortit en salle le 11 octobre 2023, Le Consentement est largement inspiré du récit éponyme de Vanessa Springora publié en 2020. Sur fonds d’années 80, Vanessa, 13 ans, côtoyait écrivains et férus de littérature lors de dîners mondains. Parmi eux, Gabriel Matzneff, un écrivain qui se révèlera être un effroyable prédateur.  TRIGGER WARNING Le Consentement aborde la pédocriminalité. Il n’est donc par recommandé pour toutes et tous ! × Ignorer cette alerte. Une époque où il était interdit d’interdire: entre complicité et laxisme Le Consentement débute dans une cour d’école. Une scène à priori banale. Pourtant, Vanessa Springora (Kim Higelin), 13 ans n’a rien de l’adolescente lambda. Habituée aux dîners mondains donnés par sa mère (Laetitia Casta), elle y apparaît comme une enfant timide, n’adressant la parole à personne. En revanche, elle y écoute très attentivement un homme chauve, la cinquantaine passée et au phrasé particulier : Gabriel Matzneff. Grimé pour l’occasion, Jean-Paul Rouve tient ce rôle particulièrement effrayant. En premier lieu prévenant, son personnage envoie par la suite des dizaines de courriers à Vanessa. D’abord réticente à cette relation, la mère finira par laisser les choses se faire. Le tout, par lassitude ou aveuglement, comme si elle aussi, était sous emprise. À moins que ce ne soit de la jalousie. Une mise en parallèle entre une femme délaissée par son mari – par les hommes en général -, en proie aux addictions et sa fille, jeune, innocente et déjà très convoitée. L’un des passages les plus marquant reste l’intervention de Denise Bombardier dans  Apostrophes. Émission où l’écrivaine québécoise y attaque frontalement Gabriel Matzneff, reprochant à sa littérature de  servir «d’alibi» à ses crimes et abus de pouvoir. «Moi, M. Matzneff me semble pitoyable», lance-t-elle avant de poursuivre : «Comment s’en sortent-elles, ces petites filles, après coup? Moi je crois qu’elles sont flétries et la plupart d’entre elles, peut-être, pour le restant de leurs jours.»  Ce jour là, en plateau, elle est la seule à remettre ces agissements en question face à des invités hilares. Face à cette émission, la mère de Vanessa éteint la télévision. En effet, ces paroles entrent en contradiction avec ce qu’elle laissait faire au même moment au sein de son propre foyer. En outre, lorsque le personnage de Vanessa décide de rompre avec son « amant », celui-ci appelle inlassablement, et en pleine nuit sur le téléphone du domicile familial. La mère s’étonne alors : « Mais, c’est dommage, il t’aime bien pourtant. » Un passage qui a largement fait soupirer d’exaspération l’entièreté de la salle, marquant ainsi désapprobation et incompréhension. Deux rangées derrière la notre, nous avons même pu entendre un couple chuchoter « C’est tellement dégueulasse« . https://www.youtube.com/watch?v=H0LQiv7x4xs&t=2s Une relation d’emprise qui va crescendo Sans connaissance du contexte, on pourrait croire que Le Consentement est une histoire d’amour entre un homme et une femme incluant une grande différence d’âge. Ce qui dérange certains, même lorsque les deux parties sont majeurs. Cependant, il n’en est rien. Car on le répète, Vanessa n’a que 13 ans et l’homme face à elle à le quadruple de son âge. Et bien que Kim Higelin, l’interprète de la jeune fille en ait 23 en réalité, la voir dans ce rôle nous met mal à l’aise. Évidemment, comme dans chaque relation impliquant de l’emprise, tout débute de manière quasi romantique. Dans les années 80, on parle ici de relation épistolaire. D’abord, uniquement du côté de Gabriel Matzneff. Puis, de Vanessa. Viennent ensuite les premières balades et enfin, une invitation à l’appartement de l’homme. Lieu où, pour détendre l’atmosphère, Matzneff met de la musique sur son tourne-disques, esquissant quelques pas de danse un peu gauche. Mais, comme dans toute relation toxique, le vrai visage du prédateur ne tarde jamais à se dévoiler. Étape par étape, on passe ainsi d’avances, à la séduction, et bien sûr, la manipulation. SPOILER & TW 1 Tout au long du films, les scènes “d’amour” sont vraiment déstabilisantes. En effet, elles mettent en images ce que nous avons lu dans le livre. Ce ne sont donc pas deux personnes qui s’aiment comme on veut bien nous le faire entendre, mais une adolescente abusée par un homme de 50 ans. Homme qui lui fait croire que tout cela est “très beau, très rare” et bien sûr, “que de l’amour“.  Gabriel Matzneff (Jean-Paul Rouve) et Vanessa Springora (Kim Higelin) Pour Vanessa, la désillusion est terrible. Elle, que Matzneff appelle souvent « mon enfant », découvre qu’il cumule en cachette les « amours » avec d’autres adolescentes. Parfois, en même temps. Et pour ne rien arranger, qu’il pratique également le tourisme sexuel sur de petits garçons aux Philippines. C’est notamment la lecture de l’un des livres de l’écrivain qui agit comme élément déclencheur et véritable prise de conscience. En effet, Matzneff y décrit sans vergogne sa passion pour « les culs frais de Manille« . On découvre alors une adolescente tantôt désoeuvrée, abattue, tantôt en proie à une énorme crise de panique. Le tout, dans la chambre d’hôtel permanente de son amant. Là, seule face à un miroir, elle réalise ce qu’elle vient de lire. Dans son reflet, elle aperçoit alors quatre ou cinq jeunes garçons dont certains d’origine asiatique. SPOILER & TW 2 Parmi les scènes choquantes compte également un jour où Vanessa et Gabriel Matzneff sont dans leur chambre d’hôtel. L’homme y apparaît assis au bord du lit, chemise ouverte et pantalon baissé jusqu’aux chevilles, sexe apparent. S’en suit une fellation montrée de manière subjective. Une scène qui a également secouer la salle. Avis final Le Consentement est un film qui marque. Pas seulement pour ces scènes que l’on juge glauques et malaisantes mais aussi par la dépiction de l’emprise telle qu’elle est en vérité. En effet, pour l’avoir vécu nous-même, nous savons qu’elle peut provenir d’une relation amicale, familiale ou amoureuse.  Autant dire qu’après ces deux heures à regarder cela, de nombreuses questions nous viennent à l’esprit :  « Comment la société a-t-elle pu être aussi laxiste ?« , « Combien d’autres enfants ont subis

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