A Long Day’s Journey into Night : Entre émotions et déception
Le Wyndham’s Theatre de Londres accueille jusqu’au 8 Avril la célèbre pièce d’Eugène O’Neill A Long Day’s Journey into Night, mise en scène par Richard Eyre. Le 3 Février 2018, Les Insouciantes ont eu la chance se rendre dans le beau et vivant quartier de Charring Cross à Londres afin de voir A Long Day’s Journey into Night. Après son acclamation au Bristol Old Vic Theatre, Jeremy Irons et Lesley Manville n’ont pas hésité à reprendre leurs rôle dans cette mise en scène de Richard Eyre – notamment connu pour son travail avec le Royal National Theatre. Une histoire puissante A Long Day’s Journey into Night est une pièce autobiographique de Eugène O’Neill. Écrite en 1942, elle ne sera publiée qu’à titre posthume en 1956. L’histoire se déroule lors d’une journée d’été 1912 alors que la famille Tyrone est en vacance dans sa maison en bord de mer. Ancien comédien dont le succès a été aussi fulgurant que rapide à disparaître, le père, James Tyron (Jeremy Irons) a du mal à accepter sa situation. Son épouse, Mary (Lesley Manville) est quant à elle une ancienne morphinomane tout juste sortie d’une cure de désintoxication. À leurs côtés, sont présents James Junior (Rory Keenan), fils ainé ayant désiré en vain de suivre les traces de son père, et Edmund (Matthew Beard), le cadet. Dès le début de la pièce, on comprend que ce dernier, marin, est malade depuis quelques temps. Ce n’est cependant qu’à la fin de la représentation que l’on apprendra qu’il est atteint d’une maladie grave (probablement la tuberculose). Inutile de vous en dire davantage pour que vous compreniez que tous les personnages sont atteints de troubles et autres problèmes les rendant vulnérables et déchirés. Ainsi, l’adaptation de cette pièce est difficile. Le choix des acteurs primordial et leur implication totale. Que l’on soit comédien ou simple spectateur, il est impossible de ressortir indemne après avoir côtoyé une telle oeuvre. Un casting cinq étoiles Richard Eyre a fait confiance à de grands acteurs pour porter cette pièce. À commencer par le comédien chevronné, Jeremy Irons, qui a notamment obtenu l’Oscar du Meilleur acteur pour son interprétation du richissime comte Von Bulow dans Le mystère Van Bulow de Barbet Schroeder. Face à lui, Lesley Manville (Le Drôle de Noël de Scrooge, Mr Turner, Maléfique) est également une pointure dans le paysage artistique anglais. Leurs enfants sont quant à eux interprétés par Rory Keenan et Matthew Beard. Tant sur le plan théâtral que dans l’audiovisuel, la réputation du premier n’est plus à faire. Capable de se glisser dans des rôles tous plus différents et intéressants les uns des autres, Rory Keenan s’est notamment illustré dans la série télévisée Versailles. Quant à Mattew Beard, vous l’aurez peut-être déjà vu dans The Imitation Game, film dans lequel il partage l’affiche avec un autre habitué de la scène anglaise : Benedict Cumberbatch. À 28 ans, le comédien a fait déjà preuve d’une grande maturité artistique et d’un talent certain. Scénographie et prestations remarquables Pour être honnête, nous ne voulions manquer cette représentation sous aucun prétexte et avions réservé nos places depuis déjà plusieurs mois. Référence dans le domaine, nous nous étions promis d’aller voir jouer Jeremy Irons dès qu’il serait de passage par la capitale anglaise. On aurait voulu pouvoir vous en dire autant du regretté Alan Rickman que nous n’avons jamais eu la chance de voir sur les planches. Autant vous dire que nous portions beaucoup d’espoir sur cette soirée particulière. Installés au balcon de ce somptueux théâtre londonien, nous sommes ravies de constater que nous n’aurons aucun problème à discerner ce qui se produira sur scène. En effet, elle est en pente et les objets suffisamment volumineux. La scénographie est quant à elle remarquable. Sur scène prend place un salon, une pièce avec un piano ainsi qu’un escalier Ceci a été merveilleusement pensé afin de laisser le spectateur en tant qu’invité dans la maison. Bien que simples, les meubles restent efficaces, tandis que les lumières et les peintures éveillent les sens et rendent le décor encore plus crédible. Vêtus de costume d’époque, et comme savent si bien le faire les anglais, les comédiens échangent des répliques de manière très naturelle. Sur scène, les acteurs sont remarquables. On salue d’ailleurs la performance de Lesley Manville qui nous a tout simplement ébloui. Le stress de la mère et la maladie du fils nous ont mis mal à l’aise et nous avions simplement envie de crier : « Mais écoutez-vous! » aux membres de la famille afin de les aider à résoudre leurs problèmes. Jeremy Irons : la déception Seulement voilà, une ombre se dresse au tableau. Si, en tant que français il est facile de comprendre les trois autres acteurs, ce n’est pas le cas de Jeremy Irons. Nous le savions « mâcher » ses mots dans ses films, mais nous n’imaginions pas qu’il en serait de même au théâtre. En effet, il est d’usage que les comédiens travaillent leur articulation pour être compréhensible de tous. Ainsi, malgré notre bonne connaissance de la langue anglaise, dès que Jeremy Irons parlait, il nous était impossible de comprendre quoi que ce soit. Pourtant, nous n’en sommes pas à notre première coup d’essai dans la langue de Shakespeare. Là où habituellement l’interprétation et les sentiments dégagés nous permettent de comprendre ce qui nous échappait, ici… rien. De ce fait, trois heures dans cet état d’esprit se sont avérés compliquées. Mais soyons clair, nous avions mis la barre très haut à l’égard du talent de Jeremy Irons et avons probablement été déçues pour cette raison. Malgré tout, A Long Day’s Journey into Night reste dans nos esprits comme un moment magique et spécial. Car avouons-le, il n’est pas donné de vivre ce genre d’expériences tous les jours ; surtout dans un décor aussi somptueux et avec de tels acteurs. Si la compréhension de la langue anglaise ne vous pose aucun problème ou que Jeremy Irons ne vous effraie pas, nous vous recommandons cette pièce qui se joue au Wyndham’s Theatre de Londres jusqu’au 8 Avril 2018.
A Christmas Carol : Magique et généreuse
Jack Thorne revisite le mythique A Christmas Carol de Charles Dickens au Old Vic Theatre de Londres Début décembre 2017, deux de nos rédactrices ont littéralement craqué pour l’un des incontournables de noël : A Christmas Carol. Signé Charles Dickens, ce conte a été revisité au Old Vic Theatre par le scénariste et dramaturge Jack Thorne (Harry Potter et l’Enfant Maudit, Shameless, Skins). Bonus : Rhys Ifans dans le rôle de l’exécrable Ebenezer Scrooge. Un conte imprégné dans la culture anglophone Avant de vous parler de la pièce, revenons un peu sur le contexte. Vous connaissez probablement tous Charles Dickens pour Oliver Twist (1837), Nicholas Nickleby (1838) ou David Copperfield (1849). Mais ce n’est pas seulement cela puisqu’on lui doit LE conte immanquable à l’approche de Noël : A Christmas Carol (Un Chant de Noël). Véritable institution anglophone, A Christmas Carol nous plonge dans le Londres Victorien tant chéri par Dickens. Au coeur de l’intrigue, Ebenezer Scrooge, vieil homme solitaire, acerbe et avare reçoit la visite du fantôme de son regretté associé Jacob Marley. Captif des chaînes forgées au fil de sa vie, Marley annonce à Scrooge sa possibilité de se racheter auprès de ses pairs. Pour cela, il devra suivre trois fantômes associés aux noëls passés, présents et futurs. Myra McFadyen (fantôme du Noël Passé) et Rhys Ifans (Ebenezer Scrooge) | ©Manuel Harlan De multiples adaptations Des ballets à la bande dessinée en passant par la musique classique, le théâtre ou le cinéma, aucun art n’a omis sa propre adaptation du chef d’oeuvre britannique. Impossible d’aborder le sujet sans vous recommander Le Drôle de Noël de Scrooge (2009). En plus d’être particulièrement fidèle au livre, le film a été tourné en capture de mouvement 3D et livre une véritable performance de la part de Jim Carey qui s’illustre dans pas moins de sept rôles. Sont également présents Gary Oldman et Colin Firth. D’ailleurs, saviez-vous qu’avant d’interpréter le rôle titre dans la pièce de Jack Thorne, Rhys Ifans avait prêté sa voix au personnage de Bob Cratchit dans l’animation Christmas Carol : The Movie (2001). Jack Thorne : magicien de la mise en scène ! La réputation de Jack Thorne n’étant plus à faire, c’est avec une impatience certaine que nous avons poussé les portes du Old Vic Theatre afin de découvrir sa vision de A Christmas Carol. Un mince pie à la main, nos yeux dérivent au-dessus de nos têtes où de multiples lanternes suspendues ont remplacées le large lustre. Plus bas, nous sommes surpris par la mise en place d’une scène aussi centrale que transversale sur laquelle ont été installé une partie des sièges. Inutile de nous en montrer davantage pour deviner à quel point la prestation se montrera aussi intimiste que généreuse. Généreuse, c’est sans conteste le mot qui évoque le mieux la splendide mise en scène de Jack Thorne. Entre une scène à l’aspect minimaliste dont les éléments jaillissent et se rétractent sans cesse, un jeu de lumière éblouissant et des comédiens entrant et sortant de partout à la fois, nos yeux ne savent plus où se poser. Car oui, en plus d’évoluer sur scène, c’est bien jusqu’aux balcons que se faufilent les acteurs afin d’échanger quelques répliques. Ainsi, le public se retrouve en immersion totale, et nous, on adore ! Qui dit A Christmas Carol implique des chants de saison, et cela, Jack Thorne l’a parfaitement compris. Dans un véritable esprit de noël, les comédiens interprètent tantôt des morceaux du répertoire anglais, mais aussi français (Il est né le divine enfant), tantôt des airs connus à l’aide de clochettes de diverses tailles. La magie opère, et on l’avoue, nous ramène directement en enfance. Rhys Ifans dans le rôle de Ebenezer Scrooge | ©Manuel Harlan Des femmes pour incarner les Fantômes des Noëls Certainement la plus grande digression à l’oeuvre originelle, Thorne a choisi de faire appel à trois femmes afin d’accompagner Ebenezer Scrooge dans son périple. Tour à tour, Myra McFadyen (Fantôme du Noël Passé), Golda Rosheuvel (Fantôme du Noël Présent) et Melissa Allan (Little Fan) inculquent leurs valeurs au vieil homme à l’air aussi enjoué que fébrile face aux différents instants de sa vie. Avec elles, se succèdent instants de tensions et d’humour, détendant aussitôt l’atmosphère. Même Little Fan, dont, en tant que Fantôme des noëls futurs, la lourde tâche est de montrer à son frère ce qui l’attend parvient à nous émerveiller. Un rôle taillé pour Rhys Ifans Incarnation parfaite du Ebenezer Scrooge de notre imagination, Rhys Ifans est tout simplement épatant. En une fraction de seconde, il déclenche notre empathie pour le vieux Scrooge et nous mène de la joie à la tristesse, de l’émerveillement à la peur, et surtout, du rire aux larmes. A l’apogée de sa performance, le gallois se permet même d’insérer une part d’improvisation. Alors qu’une jeune femme est conviée à participer, il se met à hurler : “Une femme avec un pantalon”, provoquant ainsi l’hilarité de la salle face à l’anachronisme de la situation. Si Londres est dans votre carnet de voyage avant le 20 Janvier et que l’esprit de noël persiste dans vos coeurs, rendez-vous au Old Vic Theatre afin de profiter pleinement de cette expérience hors du commun et fascinante. Et vous, avez-vous eu l’occasion de voir A Christmas Carol ? A NOTER! Depuis cette saison réussite au Old Vic, A Christmas Carol est renouvelée tous les ans avec un nouveau casting! La saison 2022-2023 a lieu du 12 novembre 2022 au 7 janvier 2023. Vous pouvez réserver vos places directement sur le site du Old Vic! × Rejeter l’alerte NEWSLETTER Facebook Twitter Instagram Pinterest Linkedin